La nappe, qui alimente un million de personnes en Ile-de-France, atteint son plus bas niveau historique. Les habitants du département ne sont pas les seuls concernés : si la moitié des consommateurs habite la Seine-et-Marne, l'autre loge à Paris et dans la petite couronne, héritage de l'époque où la capitale a construit son réseau d'approvisionnement en puisant aux meilleures sources et où la grande banlieue n'existait pas.
Non seulement la quantité d'eau est insuffisante, mais sa qualité est très dégradée. Peu profonde, la nappe est particulièrement vulnérable aux pollutions d'origine agricole. Dans ce département céréalier, les résidus de pesticides et de nitrates présents dans l'eau souterraine crèvent les plafonds réglementaires. Depuis dix ans, 15 % des habitants du département sont alimentés en permanence par une eau dépassant ces seuils et 80 % connaissent régulièrement des interdictions de consommation pour les femmes enceintes et les nourrissons. Les collectivités locales doivent donc aujourd'hui se battre en même temps sur deux fronts, pour préserver à la fois la quantité et la qualité de l'eau.
Les marges de manoeuvre pour économiser sont limitées. 90 % des volumes prélevés sont utilisés pour l'eau potable. Or l'efficacité des restrictions imposées aux particuliers est "très difficile à mesurer", relève Cécile Rousseau, responsable du service de la police de l'eau à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt. Malgré tout, évolution plutôt satisfaisante, la courbe de consommation baisse de 1 % à 2 % par an, tandis que la population augmente dans les mêmes proportions.
La solution la plus efficace pour préserver la nappe consiste à diversifier l'approvisionnement. Déjà, 10 000 m3 d'eau sont prélevés chaque jour dans la Seine. Cette quantité passera à 30 000 m3 quand l'état de crise renforcé sera déclaré. Cependant, la potabilisation de l'eau de la Seine revient plus cher. Le prix à la production passe de 0,25 à 0,50 euro par m3. Autant dire que les collectivités de Seine-et-Marne voient d'un oeil de plus en plus critique l'exportation de l'eau du Champigny hors du département.
Pour améliorer la qualité de l'eau, les communes doivent aménager de nouvelles infrastructures. L'agglomération de Melun vient d'ouvrir une unité de production d'eau potable qui permettra d'éliminer les pesticides. De son côté, le conseil général tente, dans le cadre du plan départemental de l'eau lancé en septembre 2006, de mener une action préventive. La méthode peut donner des résultats spectaculaires. La petite commune de Verneuil-l'Etang a, par exemple, réussi à diviser par dix les quantités de produits chimiques employées, grâce à la formation de son personnel, au désherbage thermique ou au paillage des massifs de fleurs.
Le conseil général tente également d'agir auprès des industriels, et surtout des agriculteurs, qui restent les principaux utilisateurs de produits polluants. Selon Hervé Durand, directeur départemental de l'agriculture et de la forêt, quelque 350 agriculteurs, sur 2 600, emploient des méthodes moins gourmandes en pesticides, "dans une trop grande discrétion".
Hubert Huygue en fait partie. Depuis qu'il a adopté ces techniques (allongement des rotations, abandon des labours), ses rendements ont légèrement chuté, mais ses marges, elles, ont augmenté, grâce aux économies sur les produits. "Cela demande une bonne maîtrise technique, une prise de risque plus grande, explique M. Huygue. Et il faut être prêt, psychologiquement, à faire dix quintaux de moins que ses voisins." La plupart n'ont pas encore passé ce cap.
1 commentaire:
Eh oui, nous avons connu une période où nous avons utiliser sans compter les ressources naturelles, que nous croyions inépuisables. L'exemple de la mer d'Aral n'a pas suffit, sans doute est-elle trop lointaine...
Les associations qui se battent pour faire respecter ne serait-ce que la règlementation ne sont pas écoutées, et sont même physiquement menacé (je pense à Eau et Rivières de Bretagne).
Il faut maintenant déterminer un prix pour ces ressources, et les gérer en fonction de leur disponibilités, et non de nos besoins... Un grand chantier qui est urgent.
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